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Constance, notre fille à tous

A 9 ANS, ELLE A DÉJÀ VÉCU L'ENFER

"Constance, notre fille à tous" par Stéphanie Fugain

Paris Match| Publié le 05/11/2015 à 14h00 |Mis à jour le 05/11/2015 à 16h40

Par Stéphanie Fugain

 

Treize ans après la mort de Laurette, Mme Fugain prend la parole pour Constance.

Treize ans après la mort de Laurette, Mme Fugain prend la parole pour Constance.DR

Pourquoi tant d’efforts et si peu de résultats ? Pourquoi, nous Français, contrairement aux Allemands et à un grand nombre d’autres pays européens, sommes-nous si peu généreux concernant ces carburants de vie que sont : le sang, les plaquettes et le don d’organes ? A quelques semaines de Noël, mon vœu le plus profond est que nous retrouvions cet élan solidaire fondamental qui permettra à "toutes les petites Constance" de vivre.

Dans la chaleur de juillet, mon premier coup de gueule avait été relayé par quelques médias. Constance, 9 ans, au bord de la mort au CHU de Bordeaux, attendait une greffe de moelle osseuse qui ne venait pas. Un remake inutile, pour moi qui ai vécu cela, il y a 13 ans, quand j’ai perdu Laurette, ma fille. La période des vacances n’était pas faite pour lancer un appel au don de sang ou de plaquettes, me disait-on alors. Pourquoi, aujourd’hui, dans le désordre planétaire dans lequel nous vivons, les circonstances seraient-elles meilleures ?  Quelle écoute peut-on espérer ? Qu’importe, il est toujours temps de secouer les lourdeurs administratives, les pratiques incompréhensibles de nos services de santé et notre folle irresponsabilité face à cette solidarité vitale !

L’histoire de Constance est édifiante et indispensable. Elle met à jour une chaîne de dysfonctionnements dans laquelle notre manque de connaissance sur ce sujet conduit à l’indifférence et parfois à la mort, comme en attestent les propos du professeur Mauricette Michallet, hématologue au Centre hospitalier Lyon-Sud.« Je suis toujours surprise du manque total d’information des familles quand la maladie frappe un de leurs enfants et qu’ils arrivent, dans nos services, démunis comme s’ils n’en avaient jamais entendu parlé ».

"On repart à zéro"

Constance, 9 ans, en rémission depuis 4 ans, rechute en janvier 2015. « Un jour, elle s’est plainte de douleurs au ventre. Je l’ai tout de suite conduite aux urgences de Purpan, le CHU de Toulouse, explique Agnès Guinet, sa maman ». Pourtant, quatre années étaient passées pendant lesquelles la petite avait fini par oublier son calvaire : les douloureuses ponctions lombaires tous les quinze jours, les chimios et traitements si toxiques qu’ils la faisaient vomir et nécessitaient d’avaler plusieurs litres d’eau chaque jour pour préserver ses reins. Constance avait retrouvé ses beaux cheveux blonds, ses rêves de princesse de Disney. Agnès, sa maman raconte « à la fin, nous étions même capables, certains jours, de ne plus penser à cette maladie, nous nous sentions comme tout le monde ». En 2015, le retour à la réalité est brutal. « Dès la première visite aux urgences, explique Agnès, je perçois les hésitations des internes puis du chirurgien appelé à la rescousse. Je pensais à une appendicite, leurs visages soucieux m’alertent. Je demande qu’on appelle le spécialiste qui s’est chargé de ma fille lors de sa première leucémie. On m’annonce le résultat des prises de sang, son taux de plaquettes est à 40.000 unités alors qu’il devrait être à 80.000. Quand l’hématologue arrive, elle me dit ce que je sais déjà : « On repart à zéro ». 

 Constance, 9 ans.

Constance, 9 ans.DR

Diagnostic pour sauver Constance : il faut une greffe de moelle osseuse. Les médecins la traitent avec de la chimio en attendant qu’un donneur soit trouvé sur le fichier international qui compte environ 26 millions d’inscrits (impressionnant sauf si on ramène cela aux 7 milliards d’individus qui peuplent cette planète). A cet instant, un premier constat me vient. Après tant d’années de lutte avec l’Association Laurette Fugain, pourquoi la prise de conscience ne s’est pas encore faite en France. A quoi ont servi les opérations relayées par les médias, nous avons, certes, réalisés des avancés importantes, mais tout reste à faire ! Et pourquoi, si peu de Français figurent-ils sur ce grand fichier de la vie, alors que plus de la moitié des greffons proviennent d’Allemagne. Est-ce parce que l’Établissement Français du Sang s’enorgueillit de « ne pas greffer à tout vent » en sélectionnant les dossiers de manière si drastique que Constance, a souffert atrocement pendant des jours ? Est-ce par manque d’efficacité de l’information, et ce, malgré un grand nombre de campagnes lancées ? Est-ce parce que les Français sont moins solidaires que leurs homologues allemands qu’ils sont les derniers en matière de don de sang, de plaquettes de moelle osseuse et de don d’organes ? Est-ce parce que la collecte de ce carburant de vie est réalisée dans des conditions contraignantes, sans âme, juste pour remplir les quotas qu’elle est si peu productive dans notre pays ? Est-ce à cause d’un plan greffe peu ambitieux et contesté par les malades ? Toutes ces questions nécessitent des réponses car Constance, en juillet dernier, a bien failli mourir. 

Finalement, une solution de secours pour suppléer au manque de donneurs compatibles est proposée par l’équipe de soins de Purpan : il s’agit de réaliser une transfusion avec du sang de cordon ombilical. Prélevé à la naissance, celui-ci peut guérir plus de 80 maladies parmi lesquelles des cancers du sang. Malheureusement, malgré le plan Douste-Blazy, mis en place en 2005, pour récupérer cette matière précieuse, peu de cliniques le pratiquent, aujourd’hui. Un problème économique sans doute ? Concernant Constance, au CHU de Toulouse, impossible de réaliser cette transfusion car il n’y a  pas  de réanimation pédiatrique. La petite est envoyée au CHU de Bordeaux et après d’incroyables souffrances, est finalement greffée, le 13 juillet. Mais avant cela, afin de réaliser la transfusion dans les meilleures conditions, on avait tué sa moelle osseuse par une grosse chimio pour que les nouvelles cellules de sang  qu’elle devait recevoir arrivent en terrain neutre. Pendant ce temps, le CHU de Bordeaux, tapait à toutes les portes en quête du précieux sang ombilical, affolant la famille de Constance. Aujourd’hui, la gamine est sauve mais à quel prix ! « Elle n’est pas retournée à l’école à la rentrée, dit sa maman car avec son sang de cordon ombilical, elle se retrouve avec l’immunité d’un nouveau né, elle va refaire toute les maladies enfantines. Mais elle est très courageuse, ma fille, totalement chauve nous appelons sa jolie petite bouille : tête de lune».

"Quand la moelle osseuse ne fonctionne plus, la solidarité humaine est indispensable" - Professeur Mauricette Michallet

Paris Match. Pourquoi a t-on besoin de dons de cellules souches ?
Professeur Mauricette Michallet*. Les services de greffes les utilisent fréquemment car elles sont destinées à traiter les leucémies aigües, les aplasies et tout ce qui a trait aux maladies primitives ou secondaires de la moelle osseuse. Quand la moelle osseuse ne fonctionne plus, comme elle est l’usine qui produit les globules et les plaquettes, la solidarité humaine est indispensable.

Pourquoi les Français sont-ils moins généreux concernant le don du sang, d’organes, de cellules souches ?
Nous sommes en retard par rapport à d’autres pays européens, mais heureusement nous pouvons avoir recours au registre international sur lequel les CHU sont connectés. On compte sur ce fichier mondial: 26 millions de donneurs et, 658.234 unités de sang placentaire (sang de cordon) et pourtant, cela ne suffit pas toujours. Les médias ont donc un rôle important à jouer : en informant encore et toujours.

Il y a pourtant eu beaucoup de campagnes dans ce but !
Les gens sont un peu effrayés par ces maladies graves pour lesquelles ils n’ont peut-être pas assez d’informations, ils se protègent, ne veulent parfois pas savoir, c’est trop anxiogène. Alors pourquoi certains pays européens n’ont pas les mêmes peurs et aucune étude n’a été faite pour comprendre les disparités philosophiques, éthiques et politiques d’un pays à l’autre.

Cela n’explique pas pourquoi Constance a dû attendre et souffrir avant que l’on obtienne du sang de cordon?
Si cette option a été choisie, c’est manifestement parce qu’il n’y avait pas de donneur compatible dans le monde. Quand les parents, ont des enfants en attente de greffe, il n’écoutent plus les choix politiques, économiques et les pratiques médicales, et n’ont qu’un seul objectif les sauver. Mais, les choses doivent continuer à s’améliorer. La greffe devient aujourd’hui une stratégie personnalisée et, la greffe haplo identique, réalisée à partir de la maman, du papa, des frères ou des sœurs, non complètement identiques donnent l’espoir d’un accès plus facile à ce traitement. Cette pratique en est encore qu’à ses débuts, elle semble prometteuse....

*Professeur Mauricette Michallet est professeur hématologue à l'hôpital Lyon-Sud.

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